Bio

Tao Douay est né près de Toulouse, et il a vécu depuis, dans une de ces maisons de charme que sont les anciens presbytères, et dans un petit village perché sur les collines du Comminges qui a pour nom Montaut. Montaut a pour singularité d’avoir un habitat si disséminé que le village se résume à son église, son presbytère, une vague place, et trois ou quatre maisons... Autre singularité, le cimetière est resté accolé à son église et fait partie lui aussi du cœur du village. L’enfant Tao a pu s’amuser, rêver, imaginer entre les tombes et les cyprès. Au sein de cette enfance isolée, une parenthèse fondatrice le transformera à jamais. Sa famille quitta Montaut pendant quelques années, pour une petite ville du Chili à l’orée du désert. Une période marquante qui se termina par un retour forcé en France, et un sentiment de déracinement irrépressible.

(...) Un des plus grands penseurs du XX° siècle, Gilles Deleuze affirmait qu’on reconnaissait un artiste à son obsession et qu’il fallait demander à un artiste qu’elle était son obsession. L’obsession de Tao Douay ne prend pas de détours, elle est dans le fameux « Tout passe » du philosophe grec Héraclite. Tout passe, tout est emporté par le temps, tout finit par être détruit, le temps et la mort font que l’homme qui est là ensuite n’est plus là... Sauf que la photographie garde une trace de celui qui avait été là ; elle est capable de faire « revenir » le mort. La photographie est par excellence l’art des spectres et Tao Douay entre en photographie, comme Hamlet, entre en scène au début de l’acte I de la pièce de Shakespeare.

Serge Dejean, professeur de philosophie et historien de l’art